6. Evocations
Je suis ainsi faite : j'aime vivre l'instant, et j'aime l'exercice mental consistant à le revivre.
J'aime regarder une personne et imaginer ses formes. J'aime qu'on me dévoile ces formes pour la première fois. J'aime qu'on me dévoile des formes que je connais et que je désire. J'aime la caresse de ma main sur la peau. J'aime les tressaillements d'un sein ou d'un sexe que cette caresse engendre. J'aime le contact des bouches. J'aime le rythme de l'acte sexuel. J'aime l'orgasme. J'aime l'autre.
Mais j'aime aussi le souvenir de ces instants. Emplir mon esprit des images, des contacts, des odeurs, des actes, des sons. De la présence des personnes. J'aime ce léger pincement du coeur à l'évocation de bonheurs passés. J'aime me perdre dans les méandres et les incertitudes de la mémoire. Une chaleur intérieure m'anime, comme un écho du plaisir vécu. Certaines fois je me délecte de ces seules sensations, d'autres fois je les accompagne d'une masturbation précise et délicate, et d'orgasmes qui deviennent souvenirs à leur tour.
Pour ces plaisirs seconds, je recherche des moyens puissants d'évocation. Je me délecte de leur mise en mots, puis de la relecture des scènes ainsi transcrites. De l'idée d'être lue, que peut-être quelqu'un ressentira ce que moi j'ai ressenti en les vivant, en les écrivant et en les relisant. Le texte n'est bien sûr qu'une présentation des choses parmi d'autres, mais une présentation personnelle de femmes, d'hommes, d'événements ou de perceptions intimes.
Descriptions ou narrations peuvent prendre plusieurs formes : la conversation, le dialogue écrit, l'échange épistolaire, l'écriture de textes, publiés ou non.
Je pratique assez peu la conversation. Disons que l'instantanéité de cette forme de récit me convient mal. Sauf peut-être avec Nadine mon amie de toujours, parce que notre complicité tellement ancienne fait communiquer le fond de nos âmes. Et ce fond fait oublier la forme.
Je pratique beaucoup plus souvent la dialogue écrit avec des inconnus. Surtout des femmes. Presque toujours en me masturbant. Avec des succès divers, selon l'interlocutrice, le déroulement du dialogue, les aléas, les espaces abordés.
Je déteste l'échange épistolaire comme moyen d'évocation.
Avec des mots, j'aime par dessus tout caresser la réalité, transcrire les sensations et les regards, saisir l'insaisissable éphémère des corps qui se possèdent et s'électrisent, du bonheur, du plaisir solitaire ou partagé, ressenti ou observé. Et surtout choisir ces mots avec soin, en éprouvant soigneusement leur pouvoir.
Florence - fflorence@mail.com
Libellés : Moi seule
0 Comments:
Enregistrer un commentaire
<< Home